L’ESA planche sur une étude nommée Protein. Elle va évaluer la faisabilité et les technologies clés nécessaires au développement d’un lanceur lourd réutilisable et compétitif pour l’Europe.
Un besoin croissant de capacité de lancement
L’Agence spatiale européenne (ESA) se prépare à des projets ambitieux pour la prochaine décennie, qui nécessiteront de mettre en orbite et d’assembler de grandes structures spatiales, comme des centrales solaires (Solaris), des centres de données souverains (Ascend) ou des véhicules de transport interorbitaux (ISTV). Pour cela, il faudra disposer de fusées plus performantes et plus économiques que les actuels lanceurs Ariane.
L’Europe n’est pas la seule à s’intéresser aux lanceurs lourds, capables d’emmener plus de 70 tonnes de charge utile vers l’orbite terrestre basse (LEO). Les États-Unis, avec le SLS et le Starship, la Chine, avec les CZ-9 et 10, et la Russie, avec le projet Lenisseï, ont déjà lancé ou prévoient de développer des fusées super-lourdes pour leurs missions lunaires ou martiennes.
Protein est l’acronyme de euroPean Reusable and cOsT hEavy lift transport InvestigatioN. Il s’agit d’une étude menée dans le cadre du programme Future Launchers Preparatory Programme (FLPP) de l’ESA. L’étude vise à préparer les futurs systèmes de lancement européens.
L’objectif de Protein est d’évaluer la faisabilité technique, économique et environnementale d’un lanceur lourd européen (EHLL), optimisé pour les missions vers LEO et conçu avec la réutilisation et la minimisation de l’impact écologique en tête. L’EHLL devra être capable de fournir un accès à l’espace à faible coût et à haute cadence, et de soutenir le déploiement de grandes infrastructures spatiales.
Deux industriels en compétition
Pour mener cette étude, l’ESA a attribué des contrats à deux industriels européens : ArianeGroup et Rocket Factory Augsburg. Ces deux acteurs du secteur spatial devront proposer des concepts de lanceurs lourds réutilisables, en tenant compte des contraintes budgétaires, industrielles et réglementaires de l’Europe.
ArianeGroup est le leader du consortium qui développe Ariane 6, le futur lanceur européen qui succédera à Ariane 5 dans les prochains mois. Rocket Factory Augsburg est une start-up allemande fondée en 2018, qui travaille sur un petit lanceur orbital réutilisable nommé RFA One, dont le premier vol est prévu en 2024 également.
L’étude Protein a commencé en mai 2023 et se terminera en septembre de la même année. Durant cette période, les deux industriels devront réaliser des analyses techniques, économiques et environnementales de leurs concepts de lanceurs lourds réutilisables. Ils devront également identifier les technologies clés à développer et à démontrer pour rendre ces concepts opérationnels.
L’étude Protein ne débouchera pas directement sur le développement d’un lanceur lourd européen. Elle permettra à l’ESA de se faire une idée plus précise des possibilités offertes par cette filière. Elle servira également à orienter les futurs programmes de recherche et développement dans le domaine des systèmes de lancement.
Un enjeu stratégique pour l’Europe
L’étude Protein s’inscrit dans la volonté de l’ESA de renforcer la capacité d’accès à l’espace de l’Europe. Elle doit faire face à la concurrence internationale et à l’émergence du NewSpace. L’ESA souhaite également contribuer à la transition verte du secteur spatial. Les futurs lanceurs doivent réduire leur empreinte carbone et les déchets générés par leurs activités de lancement.
L’Europe dispose déjà d’une industrie spatiale performante et innovante. Elle a su développer des lanceurs fiables et compétitifs, comme Ariane 5 et Vega. Avec Protein, l’ESA se donne les moyens d’anticiper les besoins futurs et de préparer les technologies de demain.
L’Europe aura-t-elle un jour son propre lanceur lourd réutilisable dans l’esprit du Starship de SpaceX ? Quels seront les bénéfices et les défis de ce projet ?
Illustration en Une : Bing Image Creator
Site général de l’ESA.
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