Le cabinet de conseil Roland Berger a défrayé la chronique il y a quelques jours à propos d’une étude sur les effets de la robotique sur l’emploi. Le constat y est alarmant et ce qui a été retenu par l’ensemble des médias, c’est que les robots allaient supprimer 3 millions d’emplois d’ici à 2025. Les résultats de cette analyse n’est pas à prendre à la légère, une partie des emplois sera effectivement détruit avec la robotisation de notre société, mais ce n’est pas si simple que cela. D’autres paramètres entrent en compte et viennent contrebalancer cette étude incomplète. Je propose même quelques solutions pour que cette troisième révolution industrielle passe en douceur.

Avant toute chose, un robot n’est pas un remplaçant, mais un outil au même titre qu’un marteau ou un ordinateur. Comme l’informatique faisait peur dans les années 70/80, la robotique fait de même à la génération actuelle. A toutes époques, les technologies ont évolué, des métiers ont disparu, mais d’autres sont apparus. Il faut voir l’avenir de l’emploi avec la robotique comme des vases communicants. Les tâches répétitives, ingrates ou dangereuses vont disparaître relativement rapidement, les métiers liés à ces tâches vont faire de même, je rejoins l’étude sur ce point. Mais qui dit nouvelle révolution industrielle, dit nouvel abattage des cartes et de nombreux métiers vont apparaître pour accompagner l’arrivée des robots dans les foyers, dans les loisirs et dans les entreprises. La plupart de ces métiers n’existent pas encore et sont à inventer, aux fils des besoins qui se feront ressentir dans les années et décennies à venir.

Les robots vont d'abord travailler dans des lieux difficiles à atteindre ou dangereux comme les Robonaut 2 dans l'espace.

Les robots vont d’abord travailler dans des lieux difficiles à atteindre ou dangereux comme ces Robonaut 2 destinés à travailler dans l’espace.

La robotique, mais aussi l’impression 3D, les réalités augmentées et virtuelles vont créer un changement profond de notre société dans les décennies à venir, c’est inéluctable. Comme pour l’informatisation et les réseaux, ces domaines arriveront dans nos vies par petites touches. Mais dans 20 ans, quand vous regarderez 2014, vous pourrez contempler le bond géant que nos sociétés auront traversé. La robotique sera partout, dans le monde industriel, dans les commerces et les ateliers des artisans locaux, dans les administrations et ils seront là pour vous proposer de nombreux services pour lesquels vous aurez du mal à vous passer. Le bassin d’emploi qui en résultera sera conséquent et devrait couvrir, au moins en partie, les pertes d’emplois.

Des robots, comme le Baxter de Rethink Robotics, permettent à tout à chacun de programmer facilement un robot. Ces robots destinés à équiper les PME/PMI seront tout à fait utilisables par du personnel ayant peu de qualifications. Des formations professionnelles de télé-pilotage de robots seront disponibles pour remettre à niveau de futurs salariés d’entreprises qui y gagneront un emploi offrant de meilleurs conditions de travail.

La robotique et l’emploi ne sont pas ennemis, bien au contraire. Les robots ne sont pas destinés à nous remplacer, mais à travailler avec nous, dans le même environnement. Les robots industriels tels qu’on les voit dans les documentaires télévisés sont déjà dépassés. Ils doivent être enfermés dans des cathédrales où personnes ne peut entrer de peur de se blesser. De plus ces robots sont davantage des automates que des robots, ils n’ont pas d’autonomie propre et sont incapables de prendre des décisions face à des cas qu’ils ne connaissent pas. Aujourd’hui, ce sont les Cobots qui vont entrer sur le marché des entreprises. Les cobots sont des robots collaboratifs, qui travailleront avec les humains sur les même tâches. Le cobot, par exemple, tient une pièce pendant que l’humain y soude d’autres pièces, un humain pilote un robot à distance comme s’il était sur place (espace, fonds sous-marins, centrales nucléaires), les exosquelette sont également des cobots et ils permettent d’assister l’humain dans ses tâches sans qu’il se fatigue ou ne se blesse.

La robotique permet également un autre phénomène, dit de la robocalisation. Les entreprises qui ont délocalisé leurs outils de productions ont désormais avantage à les relocaliser en France et à utiliser des robots. Cela permettra de gagner en compétitivité tout en rapportant les chaines de fabrication sur le sol français. De plus les frais de transport vers les pays asiatiques disparaîtront. Une fois retournés en France, ces entreprises devront bien évidemment embaucher du personnel sur place, les robots restant uniquement des outils.

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Un robot suiveur de lignes capable de venir apporter des plats dans un restaurant

Sauf cas de crise majeure (conflits, climat), l’arrivée des robots est une tendance qui ne peut s’arrêter. Si un pays, comme la France, décidait de fermer ses frontières à la robotisation, ce serait mettre délibérément le pays dans une espèce de “tiers monde” qu’il serait très difficile de rattraper ensuite. Il faut plutôt essayer de réfléchir comment faire au mieux pour accompagner la troisième révolution industrielle afin que personne ne soit laissé sur la touche.

Dans mon dernier éditorial sur Planète Robots, avant d’avoir pris connaissance du rapport du cabinet de conseil Roland Berger, je proposais :

Les robots œuvreront en entreprise, parfois en collaboration avec les êtres humains ; ils apporteront de la productivité par leur travail. Les entreprises pourraient même se mettre à verser des cotisations sociales pour cette activité — ce ne serait pas si absurde —, non pour leur retraite ou leur assurance chômage, mais pour les nôtres… Il est tout à fait imaginable que les robots finissent par payer ces prélèvements sur la valeur ajoutée, tout en demeurant rentablesEt comme ils prennent de plus en plus de place dans l’industrie, leurs cotisations pourraient de plus couvrir en partie (voire complètement) les cotisations sociales des travailleurs humains. Cela peut se faire de manière indolore en les transférant simplement des employés vers les robots, suivant l’évolution de l’équipement. Finalement, ces prestations n’étant plus dues par les salariés, ces derniers coûteraient beaucoup moins cher à leurs employeurs, qui embaucheraient plus de personnel et augmenteraient les salaires. Les salariés pourraient ainsi voir croître leur pouvoir d’achat et donc consommer les produits créés par les entreprises…”

Kawada HRP-3 Promet MK-II

Le robot HRP-3 Promet MK-II est un robot de Kawada, développé pour le monde industriel

La médiatisation de ce débat mettant en exergue le rapport entre emploi et robotique m’a donné du travail. J’ai eu quelques demandes de journalistes extérieurs pour donner mon point de vue sur ce rapport. Dans l’émission écoutable ci-dessous, Bruno Bonnell (président de Syrobo), Fabien Raimbault (PDG de Cybedroïd) et moi-même avons répondu en direct sur l’antenne de Sud Radio, ce mardi 28 octobre dans le cadre de l’émission “Le Grand Referundum” sur Sud Radio.

Même si le rapport du cabinet Roland Berger est incomplet et ne prend pas en compte les apports positifs de la robotique dans les entreprises, il a au moins le mérite de soulever le débat. C’est effectivement dès aujourd’hui que les gouvernements, particulièrement en France, se doivent de s’intéresser à l’arrivée imminente de la robotique et des technologies associées. Il serait grave de faire l’impasse. Mesdames et Messieurs les dirigeants, il est urgent de réfléchir à ces questions dès maintenant.

Le numéro 30 de Planète Robots est désormais en kiosque. Ce numéro 30 coïncide avec les 5 ans de notre magazine et nous sommes fier d’y fêter notre anniversaire ! Dans ce numéro exceptionnel, vous découvrirez tout ce qu’il faut savoir sur la robotique agricole, que ce soit dans l’élevage ou dans les cultures céréalières. On découvre également comment l’impression 3D et la robotique industrielle peuvent être des outils formidables pour l’agriculture.

Autre grand dossier de ce numéro, les kits robotiques parfaitement fonctionnels à construire à la maison ou au bureau à partir d’une simple imprimante 3D. Poppy est un très bon exemple, mais il n’est pas le seul !

Le robot est dans le préLe reste du sommaire propose :

  • Tout sur le challenge Argos 2014, un concours robotique créé par Total afin de faciliter la création de robots qui travailleront sur les plateformes pétrolières.
  • Vous construisez un robot mais vous ne savez pas quelle carte informatique (Arduino, Raspberry Pi, FPGA…) utiliser pour en faire son cerveau, nous avons le comparatif pour cela.
  • Les objets connectés semblent vouloir s’équiper de Linux comme OS, pourquoi et comment ?
  • Mother, la mère de tous les objets connectés.
  • Et si nous avions finalement les moyens de décoller en direction des planètes les plus éloignées de notre galaxie ?
  • Notre sélection de robots et gadgets connectés pour fêter Noël 2014 dignement !

Les kits robotiques imprimables en 3D

 

Couverture Planete Robots 29Depuis hier, le nouveau numéro de Planète Robots est en kiosque. Dans ce numéro exceptionnel, vous découvrirez tout sur le robot le plus célèbre du monde, Asimo de Honda. Nous avons fait également un dossier sur les retombées technologiques du projet Asimo sur les autres technologies développées au sein de l’atelier Honda Robotics : Uni-Cub β, Access Survey Robot, Stride Management Assist ou la tondeuse automatique Miimo.

A côté de cela, nous proposons un large dossier sur notre vision de 10 industries majeures du XXIe siècle. Même si la robotique et l’impression 3D restent les principaux thèmes majeurs, il existe huit autres domaines qui devraient à moyen terme changer radicalement notre vie quotidienne. Il est grand temps que la France se prépare sérieusement à ces virages technologiques et certains commencent heureusement à le comprendre. Et vous ?

Google GlassAu sommaire :

  • Nicolas Denis a réuni cinq personnalités de la robotique, de l’intelligence artificielle et du monde hospitalier pour débattre sur les robots affectifs, que serons-nous sans eux ?
  • Et si le métier de journaliste pouvait se voir remplacer par un robot ? Impossible ? Ce ne l’est pourtant pas…
  • L’Afrique semblait être le continent pauvre de la robotique, mais l’ingéniosité de la jeunesse et la multiplication des fablabs sur le sol africain permettront peut-être de redistribuer les cartes à terme.
  • Saviez-vous qu’au milieu des années 1950, nous étions proche de développer des fusées gigantesques capables d’envoyer des centaines de personnes dans l’espace interstellaire pour découvrir d’autres systèmes solaires ! Et finalement, en 2014, nous ne sommes toujours pas allés physiquement sur Mars… Que s’est-il passé ?
  • L’informatique quantique nous permettrait de faire un bond technologique immense dans la puissance de nos ordinateurs et donc de l’intelligence artificielle. Certaines sociétés œuvrent désormais sérieusement à la conception de tels ordinateurs.
  • Nos tests : le robot serpillière Scooba 450 et le gyropode Inmotion SCV R1EX.

Robotique et Afrique

Planète Robots est disponible tous les deux mois en kiosque et par abonnement, tiré à 45 000 exemplaires en France, Belgique, Suisse et Canada.

Planete Robots 28Le dernier numéro de votre magazine de robotique est disponible ! Sans plus attendre, un extrait de l’édito de ce numéro :

Le 5 juin dernier a été un jour historique… À cette date, Aldebaran Robotics et SoftBank ont présenté pour la première fois au public le Pepper, un robot humanoïde conçu pour être massivement produit et distribué — à un prix très compétitif. Aldebaran Robotics espère qu’il entrera dans de nombreux foyers dès 2015 et ouvrira un marché du robot conforme aux rêves que nos lecteurs entretiennent depuis plusieurs décennies. Il y a peu encore, je pensais que l’arrivée sur le marché d’un robot de ce prix ne se produirait pas avant 2020. Espérons que sa commercialisation aura un effet boule de neige sur les autres constructeurs, qui pourront ainsi sortir leurs robots du stade prototypique et procéder à leur commercialisation ! Lorsque le client peut avoir le choix entre plusieurs produits, les fabricants pratiquent une émulation accrue, pour le bien du consommateur — qui gagne en qualité et en tarif… (suite dans le numéro)